Un entrepreneur, plusieurs pitchs

Cet article est paru dans Les Echos, le 28 août 2018.

Pour tout entrepreneur ou porteur de projet, le pitch est un exercice obligatoire. Que cela soit pour présenter sa solution au grand public ou lever des fonds auprès d’investisseurs, le pitch permet de communiquer efficacement sur son projet. Néanmoins, pour réaliser un bon pitch, quelques écueils sont à éviter !

Dans les contes populaires, la baguette magique est un objet qui permet de lancer des sortilèges selon que vous souhaitez devenir invisible, voler ou transformer votre ennemi en grenouille. Sa qualité principale réside dans sa capacité à produire des effets différents, selon l’audience et les objectifs visés. Le pitch est exactement comme une baguette magique.

Or, la majorité des entrepreneurs ne l’utilise que pour lancer un unique sortilège. Autrement dit, ils créent et apprennent un seul pitch avant de le répéter encore et encore, qu’importe leur audience et leur objectif. Le pitch ne doit pas être gravé dans le marbre, il doit évoluer au fil du temps et en fonction du contexte d’énonciation. Pour accroître votre pouvoir de conviction et de persuasion, vous devez ainsi élaborer plusieurs pitchs.

 

Quel est votre objectif ?

Question simple mais souvent omise, celle de l’objectif visé permet de déterminer quel est le message le plus important que vous allez partager à votre audience. Pourquoi prenez vous la parole ? Si votre objectif est de lever des fonds, vous allez sûrement insister sur les aspects financiers de votre projet, sur sa viabilité économique et la complémentarité des profils qui composent l’entreprise. A contrario, si vous souhaitez avant tout faire connaître votre produit au plus grand nombre, vous allez vous attarder sur ses caractéristiques, ses avantages compétitifs voire donner quelques explications techniques. Tel un cap, l’objectif va guider l’ensemble de votre prise de parole.

 

Les exemples choisis et détaillés

Dans la très grande majorité des cas, la non-adaptation à l’auditoire se remarque aisément à travers les exemples choisis et détaillés. Plus les interlocuteurs que vous avez en face de vous sont experts de votre sujet, moins les exemples ont besoin d’être présentés de façon pédagogiques ou même simplifiés. Si vous pitchez votre projet médical à des investisseurs spécialistes du domaine de la santé, ne gâchez pas du temps de parole avec trop de détails. En revanche, si vous participez à un événement grand public ou présentez votre projet à une personne qui ne connaît rien à votre activité, vous devez choisir un ou deux exemples concrets, simples à comprendre et prendre le temps de les expliciter.

 

L’incarnation

L’image renvoyée par l’orateur, que les tribuns grecs appelaient ethos, diffère aussi selon l’audience et les objectifs fixés. Face à des investisseurs professionnels, vous souhaiterez probablement renvoyer l’image d’un entrepreneur confiant, expérimenté et sûr de son projet. Face à une audience grand public, cette reconnaissance comme expert du sujet, bien qu’importante, sera peut-être moins nécessaire. Elle s’effacera alors au profit de l’image d’un orateur capable de faire la pédagogie de son projet et de le transmettre avec passion et enthousiasme.

 

Eviter de se répéter !

Il n’y a rien de pire qu’un orateur qui répète la même chose. Ainsi, ne vous dîtes jamais : « Pas de problème, j’ai l’habitude de faire ce pitch, je l’ai fait des dizaines de fois ». Non seulement, vous allez finir par vous ennuyer, et donc votre audience, mais en plus vous ne remettez pas en question votre prise de parole. Cette dernière est toujours singulière et nécessite ainsi des adaptations pour être pertinente et percutante.

Comme pour chaque sortilège lancé d’une baguette magique, chaque pitch est unique. Il ne s’agit pas de tout réinventer à chaque fois mais de varier les phrases d’accroche, la structure d’argumentation, c’est-à-dire l’ordre dans lequel vous énoncez vos idées, les exemples choisis et enfin la conclusion.

 
Adrien Rivierre